
3 mois ont passé depuis mon dernier article et il était plus que temps pour moi de reprendre mon récit de la campagne américaine saison 2020. Affaire George Floyd, Black Lives Matter, Obamagate, gestion de la crise Covid par Trump… A moins de 5 mois du vote, l’élection présidentielle américaine fait de nouveau l’actualité dans les médias et sur les réseaux sociaux et moultes balivernes vous sont balancées à la figure chaque jour, sans effort de contextualisation ou d’analyse. C’est pourquoi en bon justicier mal-pensant, I’m Back pour ramener un peu de raison et de bon sens sur tous ces sujets, même si l’émotion fait désormais force de loi d’après les autorités de mon pays.
Pourquoi n’ai-je pas alimenté le blog ces 3 derniers mois ?

Plusieurs raisons expliquent mon silence prolongé. Premièrement, la campagne américaine a été totalement mise entre parenthèses durant près de 2 mois du fait de la crise du coronavirus. J’ai pris le parti de ne pas vous décrire semaine après semaine la gestion twitterienne de la crise du Covid par Trump et de plutôt attendre que tout se calme pour analyser la situation. Après tout, ce blog n’est pas twitter et la promesse initiale que j’ai prise auprès de vous, mes lecteurs, est de fournir des articles de qualité, qui essaient de vous donner des clés de lecture sur la société américaine, dénués au maximum d’émotion et de sensationnalisme. On va peut-être me trouver peu courageux mais je peux vous assurer que j’aurais pu enchaîner conneries sur conneries et entamer ma crédibilité si j’avais pris position sur des sujets que je ne maîtrise pas comme la santé…

En outre, j’ai été, en partie, affecté par cette crise COVID sur le plan personnel. Mon projet d’expatriation au Canada est devenu incertain et j’ai laissé un peu en plan le blog pour panser mes plaies et mes fêlures d’homme blanc privilégié (on n’avait dit pas de commentaires à la twitter !). Si on combine cela avec ma paresse naturelle, vous comprenez aisément ma prise de recul de 3 mois. Toutefois, devant les horribles choses que j’ai lues ces derniers jours sur la société américaine, je ne pouvais pas me taire plus longtemps. J’ai fait un rêve mes amis, le rêve que je ne vous quitterai plus pendant les 20 prochaines semaines nous menant jusqu’au 3 novembre, jour de l’élection. Avec de nouvelles idées d’articles et l’envie farouche de vous passionner pour ce combat à mort entre le quasi-octogénaire dynamique Sleepy Joe sur ma gauche et le génie stable Donald Trump à ma droite. La campagne qui s’annonçait ennuyeuse et sans suspense prend un virage bien plus intéressant ces derniers temps…

Quelques réflexions sur 3 sujets qui ont fait parler et vont marquer la campagne
D’ici mi-juillet, je compte revenir sur 3 sujets qui ont fait l’actualité et qui vont certainement peser sur la campagne américaine lors des 5 prochains mois. Ces 3 thématiques, 1 favorable à Trump, 1 favorable à Biden et la dernière qui pourrait exploser à la figure de l’un des deux (ou des deux) méritent que l’on s’y attarde un petit peu aujourd’hui.
Le premier sujet, et non des moindres, est la crise du Coronavirus qui continue à avoir des répercussions, en particulier avec une explosion du chômage qui est passé de 3 à 20% aux Etats-Unis (puis redescendu à 16% en mai) et qui change totalement la perception du bilan de Trump sur le plan économique. Si l’électorat ne lui en tient pas rigueur et lui fait même plus confiance pour la reprise que son adversaire, Donald Trump s’est révélé d’une infinie faiblesse dans la gestion de cette crise qui sera, à n’en pas douter, le boulet de son premier mandat. Cette crise aurait pu enfin le consacrer en rassembleur et validé ses thèses patriotiques mais il n’en a rien été. Trump s’est fourvoyé dans sa communication, passant de twitter aux points presse quotidiens souvent loufoques et a rabaissé un peu plus la fonction présidentielle dans le ridicule. Incapable de prendre de la hauteur depuis 4 ans, Donald Trump a, pour la première fois, exaspéré une partie de sa base qui ne l’a pas trouvé à la hauteur des enjeux. Plus grave encore, Trump, qui est un faux fou, a fait preuve d’incohérences dans sa gestion. Se vantant d’avoir contenu le virus hors des frontières dans un premier temps, Trump a dû changer de fusil d’épaule en cours de route devant l’ampleur émotionnelle, plus que statistique, prise par la crise du COVID. L’électorat âgé blanc qui avait voté en masse pour lui en 2016, pourrait préférer se tourner cette fois vers la figure plus sage et rassurante de l’ancien vice-président d’Obama. Par ailleurs, Trump a détruit le système bancal Obamacare mais n’a rien mis à la place, le sujet de la santé était déjà au coeur des préoccupations des électeurs au cours de la primaire démocrate et ne sera pas un thème de campagne propice à faire gagner Trump.

Le second sujet est le moins mis en avant par les média mainstream, car considéré comme une fake news d’extrême droite. Il s’agit de l’Obamagate, affaire qui pourrait éclabousser le parti démocrate et Biden. Comme vous avez pu le constater, pendant 3 ans, une partie de l’Establishment à Washington n’a jamais accepté l’élection de Donald Trump et les démocrates ont tout fait pour déstabiliser la campagne électorale puis la présidence de Trump, jusqu’à provoquer un impeachment. Je ne rentrerai pas trop dans le détail aujourd’hui mais il s’agit des suites de l’affaire des mails piratés du parti démocrate au cours de la campagne 2016. Pour la faire courte, les démocrates sont persuadés d’avoir été hackés par des russes ou agents russes qui auraient tout transmis à Donald Trump, lui même agent russe dans cette hypothèse. Au moment de la passation des pouvoirs en janvier 2017, Obama et le chef du FBI, James Comey, auraient piégé le conseiller militaire de Trump, le général Flynn (ancien démocrate) qui auraient eu des contacts téléphoniques avec la Russie, preuve ultime de la compromission du camp Trump. Le procès qui s’en est suivi s’est, cependant, retourné contre les accusateurs, le général Flynn a été innocenté et il semblerait que son arrestation ait été fomentée au cours d’une réunion entre Obama, Biden, le chef du FBI et d’autres haut-fonctionnaires en utilisant de fausses accusations… Si tout cela se révélait fondé, nul doute que Trump s’en servira au moment opportun et cette crise pourrait être un Watergate puissance 10 (rien de moins qu’une tentative de coup d’état contre Trump). Je reviendrai plus longuement là-dessus dans un dossier pour mieux me faire comprendre mais restez attentifs à cette affaire dénigrée d’emblée par les grands médias, comme l’affaire des mails wikileaks en son temps qui avait pourtant eu un impact assez important sur l’élection de 2016 de par les informations qu’elle mettait en lumière (ces mails révélaient que le parti démocrate avait truqué les primaires en faveur de Clinton face à Sanders).

Le dernier thème, que je décrirai en détail très bientôt sur le blog, est le sujet qui a fait un tabac sur tous les instagram de mes amis : l’affaire George Floyd, homme noir américain arrêté et tué par des policiers blancs dans la ville de Minneapolis dans le Minnesota, état clé pour l’élection présidentielle. Face aux images révoltantes et choquantes, nous avons assisté, d’abord, à une vague d’émotion compréhensive et salutaire mais qui a très vite laissé sa place à une ingénierie sociale autour du fameux racisme systémique porté par le mouvement communautaire Black Lives Matter. Il y a deux choses à comprendre sur la société américaine pour bien aborder cette affaire. Tout d’abord, l’Amérique est un pays violent par essence. Si l’on recontextualise, les Etats-Unis sont un état quasi-policier où la police est très rarement inquiétée en cas de bavure (le contraire total de la France). Ceci s’explique aussi par le second amendement de la constitution américaine qui reconnait le droit à tout individu de constituer une milice pour contribuer « à la sécurité d’un État libre », soit le droit de porter des armes. Par conséquent, lorsqu’un policier intervient aux Etats-Unis, il a plus d’une chance sur deux d’interpeller des gens armés (parfois jusqu’aux dents). Le geste du policier est inexcusable mais intervient dans le contexte d’une société ultra-violente où les bavures policières peuvent souvent se référer à ce second amendement. Le second point à avoir en tête est que le racisme aux Etats-Unis est un sujet très sensible et bien plus prégnant qu’en Europe. En effet, nous sommes dans un pays où les noirs n’ont acquis des droits civiques identiques aux autres « races » qu’à partir de la fin des années 60. Le mal n’est toujours pas cicatrisé dans la société américaine et le modèle multiculturaliste n’aide pas à tourner la page. Pour avoir vécu 6 mois dans le quartier New Yorkais d’Harlem, j’ai été frappé par le discours qu’ont pu me tenir certains afro-américains sur leur ressenti face à l’état fédéral américain (oui, j’ai parlé à des gens dans la rue, et même à des scientologues très gentils). Beaucoup sont persuadés que le système est raciste par essence et qu’il discrimine leur communauté. Pourtant, par la politique de discrimination positive, la communauté afro-américaine est en réalité la plus « avantagée » par le système aujourd’hui. Pour rejoindre Harvard, il vaut mieux être noir qu’asiatique par le jeu des quotas par exemple. Selon moi, cette affaire révèle la crise identitaire qui traverse les Etats-Unis depuis 15/20 ans et marque, plutôt, les limites du modèle multiculturaliste. Toutefois, le mouvement Black Lives Matter, dont les dons financent directement le parti démocrate (seulement 200 000 des 100 millions de dollars ont été redistribués directement à la « lutte »), a posé le problème du racisme systémique comme raison des dérapages de la police. Concept théorisé dans les universités progressistes de Californie comme la célèbre Evergreen, ce concept est très dangereux et pourrait provoquer une véritable guerre raciale dans le pays. Ce thème va cristalliser le combat de fond entre Trump et Biden sur le vote afro-américain. Pour Biden, l’enjeu sera de mobiliser cet électorat largement acquis aux démocrates mais qui s’était très faiblement déplacé aux urnes en 2016. Pour Trump, fort d’un bilan économique très flatteur auprès de la communauté noire (plus faible taux de chômage avant la crise du COVID), l’objectif sera de poursuivre sa percée au sein de cet électorat (10% en 2016, il a désormais 20 à 30% d’opinions favorables chez les afro-américains). Deux stratégies vont donc se confronter dans les prochains mois et nous verrons qui entre Biden le compassionnel et Trump, garant de la sécurité des américains l’emportera.

Prochains dossiers sur le blog
Nous sommes donc à 20 semaines du jour de l’élection et je compte désormais profiter du focus récent des médias pour attirer votre attention en accélérant la cadence des articles. Outre les 3 articles sur les thématiques ci-dessous, je reviendrai sur la fin de la primaire démocrate remportée officiellement par Biden, la semaine dernière.

Je lancerai très rapidement 2 grands dossiers sur ce blog pour vous aider à bien comprendre le déroulement du vote et de l’élection présidentielle et de disposer d’un certain bagage historique pour comprendre le poids des forces en présence.
Vous n’êtes pas sans savoir que l’élection américaine est une élection indirecte. Etat fédéral, c’est le vote état par état qui compte. En effet, pour chaque état remporté par un candidat, celui-ci remporte un collège de délégués qui devra ensuite voter pour choisir le candidat courant décembre. Je vous expliquerai tout sur la notion de « Swing State » qui sont les états clés à suivre et qui peuvent, d’une élection à l’autre, passer du côté démocrate ou républicain. J’ai dénombré 18 états clés sur 51 et je compte vous en présenter 1 chaque semaine à partir de début juillet jusqu’à fin octobre afin que vous compreniez dans quels endroits cette élection va se jouer. Pour information, voici aujourd’hui la carte des forces en présence d’après les sondages.

La seconde série, qui me tient à coeur en bon passionné d’histoire, sera une rétrospective sur 10 élections qui se sont déroulées entre 1968 et 2016 et qui pourraient vous donner quelques clés de lectures complémentaires sur ce que devrait être le scénario de l’élection de 2020…
Je vous dis à très vite sur le blog et, en attendant, gardez un peu d’émotion pour la suite…
