
J-1 folks ! Comme chaque mardi lundi, je vous relate les événements marquants de la semaine écoulée pour vous permettre de ne rater aucun des soubresauts de ce duel mortel. Cette fois-ci le grand jour est enfin arrivé. Vous avez été courageux de tenir jusque là. Demain nous saurons enfin qui est élu président des Etats-Unis. Demain vraiment ? Pas si sûr… Avec l’imbroglio de la comptabilisation des votes par correspondance, vous devrez peut-être attendre encore une semaine voire un mois. Au programme de cette dernière semaine, émeutes en Pennsylvanie, quelques informations complémentaires sur le déroulement de la soirée électorale, des chiffres de la participation anticipée et petit bilan de la campagne.
MARDI 27/10 : Emeutes à Philadelphie, tensions en amérique

Philadelphie a connu deux nuits d’émeute et de pillage suite à la mort de Walter Wallace, un Afro-américain abattu en pleine rue par la police lundi après-midi. Comme en mai dernier, la ville américaine s’est embrasée dans le sillage du mouvement Black Lives Matter à seulement quelques jours de l’élection présidentielle. La bavure présumée a eu lieu dans le quartier de West Philadelphia. Les deux agents ont affirmé être intervenus pour une dispute familiale en présence d’un homme avec un couteau. Ce dernier aurait été abattu car il avait refusé de lâcher son arme? La famille a protesté, indiquant que l’appel était destiné à contrôler Wallace qui souffrait d’une crise due à sa bipolarité.
Malgré la suspension immédiate des deux officiers, la foule des manifestants ne s’est pas calmée et a sillonné le quartier plus ou moins pacifiquement. De nombreux petits commerces ont été pillés et certains policiers ont été blessés. Cet événement a été suivi de près par la Maison Blanche qui y a vu un bon prétexte pour relancer son slogan « Law&Order » qui avait fait mouche cet été. Donald Trump a fait de la montée de la criminalité dans les grandes métropoles, gérées par des démocrates, un argument contre son concurrent pour parvenir à combler son retard dans la dernière ligne droite. Cet événement pourrait profiter au Président dans l’Etat de Pennsylvanie, primordial à la victoire pour les 2 candidats.
La tension et les craintes d’émeutes se matérialisent un peu partout en Amérique à quelques jours de l’élection. De nombreux commerces s’inquiètent d’une flambée de violences en cas de victoire de Donald Trump et se barricadent déjà en anticipation de mardi. Par peur de troubles, Walmart a retiré les armes et munitions de ses 4700 magasins… avant de se raviser sous la pression de ses clients. La première semaine de novembre risque de ne pas être de tout repos.

MERCREDI 28/10 : Brèves de campagne
Pennsylvanie toujours avec une bonne nouvelle pour Trump en ce mercredi. Le Pittsburgh Post Gazette a officiellement apporté son soutien à Donald Trump pour l’élection de 2020. Ce journal n’a pas soutenu de républicain pour la présidentielle depuis 1972. Par ailleurs, POTUS a également reçu le soutien de certaines figures noires du R’n’B ces derniers jours : Lil Wayne, Ice Cube ou encore 50 Cent ont annoncé soutenir Donald Trump dans sa campagne de réélection. Ces coming-out sont annonciateurs de bons résultats de Trump au sein de la communauté afro-américaine. En effet, les sondages prédisent à Trump environ 15% des voix ce qui serait un record pour un président républicain depuis 1972 aussi !

Au rayon des mauvaises nouvelles, l’explosion des cas de Covid a fait chuter les cours de bourse ce mercredi, le Dow Jones perdant plus de 800 points en une séance. Donald Trump espérait arriver aux urnes avec le record de points de l’indice mais c’est encore un échec. Décidément, la pandémie est le principal adversaire de Donald Trump dans cette seconde campagne présidentielle.
JEUDI 29/10 : Quand connaîtrons-nous les résultats dans les états clés ?

Je vous en ai beaucoup parlé au cours de la campagne, le vote par correspondance a été massif et sans précédent dans l’histoire des élections américaines. Avec peut-être plus de 50% des électeurs qui auront choisi ce mode de vote, il se pourrait que tous les bulletins ne soient comptabilisés d’ici au 4 novembre. En effet, les règles de comptabilisation diffèrent selon les états. Petit tour d’horizon des règles en vigueur dans les principaux Etats clés :
- Arizona : La commission électorale est incapable de dire combien de bulletins elle sera capable de comptabiliser dès mercredi. Comme une loi autorise de dépouiller les bulletins reçus 2 semaines avant le vote, l’Arizona devrait nous donner le nom de son vainqueur au plus tard mercredi 4 au soir.
- Floride : Tous les votes reçus en avance sont dépouillés dès le 3 au matin. La Floride devrait donner son résultat à peu près à la même heure que d’habitude, c’est-à-dire pendant la nuit du 3 au 4 novembre.
- Géorgie : De nombreux bulletins ont été reçus par correspondance cette année. Toutefois, le secrétaire d’Etat a annoncé que l’Etat devrait être capable de déclarer un vainqueur dans la journée du 4 novembre.
- Iowa : Pas de changement par rapport à une élection habituelle. Des résultats non officiels seront données dans la nuit du 3 au 4 novembre même si les bulletins, envoyés avant le 3 et arrivant jusqu’au 9 novembre seront comptabilisés.
- Maine : Pas de retard prévu dans le Maine. Les résultats officiels seront connus dans la nuit du 3 au 4 novembre.
- Michigan : Les résultats officiels ne sont pas attendus avant le 6 novembre. Il faudra donc être prudent avec les résultats annoncés dans la nuit du 3 au 4.
- Minnesota : Objectif fixé par les autorités : avoir comptabilisé près de 100% des bulletins à minuit le 4 novembre. Toutefois, l’Etat s’accorde le droit d’attendre jusqu’au 10 novembre pour annoncer un vainqueur.
- Nevada : Les autorités ne savent pas quel pourcentage de bulletins seront dépouillés le 4 à minuit. Les bulletins seront comptabilisés jusqu’au 10 novembre.
- New Hampshire : On devrait connaître les résultats comme d’habitude dans la nuit du 3 au 4 novembre.
- Caroline du Nord : 98% des bulletins devraient être comptabilisés dans la nuit de l’élection. Toutefois, les bulletins retardataires seront comptabilisés jusqu’au 12 novembre.
- Ohio : La palme de l’Etat le plus lent revient à l’Ohio. Des indications sur le pourcentage de dépouillement et l’Etat de la course seront remontés le 3 au soir. Toutefois, tout bulletin arrivant jusqu’au 13 novembre sera comptabilisés et l’Etat donnera le résultat final le … 28 novembre !
- Pennsylvanie : La majorité des bulletins seront comptabilisés d’ici au vendredi 6 novembre, date à laquelle un résultat définitif devrait être communiqué, à moins que la Cour Suprême s’en mêle.
- Texas : Nous devrions connaître les résultats dès le 4 au matin.
- Virginie : Un pourcentage inconnu de bulletin sera comptabilisé dès le 4 au matin. Toutefois, les résultats officiels ne devraient pas être connus avant le 6 novembre.
- Wisconsin : Le Wisconsin devrait être en capacité de fournir un résultat définitif entre 3h et 6h du matin le 4 novembre.
Vous l’avez compris, si c’est serré, on n’est pas prêt de savoir quoi que ce soit mercredi.
VENDREDI 30/10 : derniers meetings de campagne
Chez les républicains, c’est un programme au pas de charge pour Donald Trump. Pas moins de 15 meetings vont être organisés entre samedi et lundi et le président parvient à réaliser l’exploit de s’arrêter dans presque tous les Swing States. Minnesota, Arizona, Michigan, Wisconsin, Pennsylvanie samedi. Michigan, Iowa, Caroline du Nord, Géorgie, Floride dimanche. Caroline du Nord, Pennsylvanie, Michigan, Wisconsin et enfin Michigan à nouveau comme dernier acte à Grand Rapids comme en 2016. Donald serait-il superstitieux ?
Du côté de Joe Biden, la vieille paire Biden/Obama se reforme pour motiver enfin les troupes à la dernière minute. Floride, Iowa vendredi, Caroline du Nord 2 fois le samedi, Michigan 3 fois dimanche et enfin 5 arrêts en Pennsylvanie pour la seule journée de lundi. Sleepy Joe ne dort plus !
SAMEDI 31/10 : Le COVID remonte dans les éTAtS clés
Si la lutte entre Joe Biden et Donald Trump est plus serrée que jamais dans les Etats clés, il y a bien un chiffre qui décolle : celui des cas positifs au COVID 19. En effet près de 100 000 personnes ont été déclarés positifs pour la seule journée de samedi ce qui fait atteindre le seuil des 9 millions de cas. Pire encore, la reprise de la pandémie a surtout lieu actuellement dans les Etats de la Rust Belt, si importants pour Trump. Cette résurgence de dernière minute pourrait coûter chère au POTUS.
DIMANCHE 01/11 : Ultime récapitulatif du vote anticipé !

Près de 90 millions d’Américains ont déjà voté cette année. C’est tout simplement 60% du total de la participation en 2016. On semble se diriger vers une participation record cette année, de l’ordre de 150 à 170 millions de votants. A qui va profiter cette mobilisation ? Tout dépend des Etats. Au Texas, 10 millions de votes ont déjà été exprimés soit 1 million de voix de plus que la participation totale en 2016 ! Pourquoi un tel engouement là-bas ? C’est peut-être la première fois que l’élection pourrait être serrée ici depuis les années 1970 et qui dit état serré dit état à forte participation. Il en est de même en Géorgie où près de 3,8 millions de personnes ont déjà voté (la participation totale était de 4,1 millions en 2016). Une participation de 6 millions de votants est attendue cette année et là encore, on pourrait bien avoir d’énormes surprises dans ce bastion républicain. Plus globalement, près d’un électeur sur quatre sera un nouvel électeur cette année. L’institut de sondage réputé IBD/TIPP observe globalement une sur mobilisation des démocrates dans les Etats déjà « Bleus » mais c’est moins clair dans les Etats disputés. 2 élections récentes ont connu des taux de participation assez forts : 2004 et 2008. En 2004, ce sont les républicains qui s’étaient mobilisés en masse, faisant pencher la balance de justesse pour Bush. En 2008, la mobilisation avait été démocrate et avait permis à Obama d’écraser l’élection. Quid de 2020 ?
LUNDI 02/11 : Bilan de campagne
Et voilà J-1. Quelle campagne… pourrie mes amis ! Contrairement à 2016, l’élection présidentielle américaine a été beaucoup moins palpitante et passionnante, la faute au COVID-19 qui a tout chamboulé. Donald Trump n’avait pas la même vigueur qu’en 2016 et Joe Biden n’était clairement pas un candidat enthousiasmant comme avaient pu l’être Obama ou même Hillary Clinton. Quel bilan peut-on donc tirer de cette campagne ?
Tout d’abord, qu’aucune thématique n’a réussi à faire bouger les lignes : économie, covid, émeutes raciales, rien n’a changé le rapport de force. A J-1, les démocrates possèdent 5 à 8 points d’avance sur les républicains. Contrairement à 2016, l’électorat est, d’ailleurs, très peu indécis : seulement 5% des électeurs ne savent pas pour qui ils vont voter demain. La faute à la personnalité clivante de Donald Trump ? En partie, oui. Donald Trump est un Président qui n’aura laissé indifférent ni l’Amérique ni le monde. Mélange entre brute vulgaire et stratège à l’instinct génial, Donald Trump n’est pas parvenu à rassembler les Américains autour des valeurs qu’il portait. Mais en réalité le pouvait-il ?
Pendant 4 ans, les élites médiatiques ont oscillé entre diabolisation et condescendance, le décrivant comme une personne indigne de la fonction présidentielle. Bien sûr, il n’est clairement pas exempt de tout reproche bien au contraire. Approximations à tout va, vantardise, diatribes incessantes contre les journalistes, tweets rageurs et compulsifs, Donald a fatigué l’américain comme jamais. Toutefois si Trump ne repasse pas, la révolution nationaliste trumpienne elle survivra. En effet, comme je vous le disais dans mon billet introductif sur ce blog, l’Amérique, comme l’Occident, se fracture autour de différentes valeurs qui, autrefois, marquaient son unité : liberté, identité, travail.
Aujourd’hui l’Amérique est coupée en 2 et le phénomène Trump était une réponse, une colère des perdants de la mondialisation contre leurs élites bien-pensantes et technocratiques. En excommuniant d’office Trump et tout ce qu’il représentait, il me semble que les problèmes soulevés par la campagne de 2016 n’ont pas été adressés par le camp démocrate et c’est pour cela que je pense que le rapport de force sera à peu près identique dans les urnes demain. Le phénomène Trump méritait une réponse et un déchiffrage et non des crachats. J’aurais aimé que les 2 camps abordent ses thématiques de fond mais le show américain a comme toujours prévalu.
Demain, je clôturerai cette séquence campagne électorale par mon article pronostic, en espérant ne pas me tromper gravement, c’est mon titre d’expert qui est en jeu quand même ! En attendant, j’espère être parvenu à vous donner un éclairage différent sur la politique américaine au cours de ces 10 mois d’aventure.