21 mois de présidence Biden : Septembre 2021-Mars 2022, le temps de l’inflation des tensions (2/3)

Dans ce deuxième opus sur les 21 mois de présidence de Joe Biden, nous retraçons les événements allant de septembre 2021 à mars 2022. Au cours de ces 7 mois, Sleepy Joe est mis plus rudement à l’épreuve : inflation des cas de Covid, inflation des prix du pétrole et des biens de consommation et inflation des tensions entre la Russie et l’Ukraine qui explosent le 24 février 2022 avec l’invasion de l’Ukraine par l’armée russe de Poutine. Biden est-il parvenu à surmonter cet amoncellement de difficultés et ses actions sont-elles toujours validées par une majorité des électeurs ?

politique Economique et sociale : Le blocage des réformes au sénat ou la guerre des 2 joe

Evolution des principaux indicateurs économiques sur la période

En ce qui concerne l’économie, Joe Biden tente de poursuivre sur sa lancée du premier semestre 2021 en poussant pour le vote au parlement de sa loi d’investissement dans les infrastructures. Donald Trump avait également cette proposition dans son programme de 2016 mais il avait préféré l’abandonner pour ne pas se mettre en porte à faux avec les élus libéraux républicains. Joe Biden dispose quant à lui du soutien des élus démocrates à la Chambre mais doit tout de même négocier avec l’un d’entre eux au Sénat pour s’assurer d’une majorité. Son nom ? Joe Manchin. Sénateur de la Virginie depuis 2012, Manchin est un démocrate élu dans une circonscription pro Trump à plus de 70%. Il est, par conséquent, le sénateur démocrate le plus conservateur du Sénat et vote 50% du temps avec les républicains (que ce soit sous le mandat de Trump ou de Biden). Il est l’élu le plus puissant de la mandature puisqu’il peut à lui seul faire ou défaire les lois du président Biden. La relation entre les 2 Joe est virile mais correcte au début du mandat et Biden avait pu obtenir son accord pour le vote de l’American Rescue Act. Le 15 novembre 2021, Biden réussit, encore, à faire passer sa loi sur les infrastructures, approuvée de manière bipartisane par 69 voix contre 30, grâce, en partie, à l’aide apportée par Joe Manchin dans les discussions avec les élus républicains. Cette loi prévoit des dépenses totales de 1 200 milliards de dollars sur 10 ans pour améliorer tous les types de transport : aéronautique, ferroviaire, autoroutes, ponts, hubs portuaires etc… avec une touche écologique prononcée.

Le détail des dépenses de la loi votée en Novembre qui prévoit de rénover les infrastructures du pays tout en respectant les engagements des accords de Paris sur le climat

Après le passage de cette loi très importante, Joe Manchin va devenir l’épine dans le pied de Biden. Le président souhaite, à partir de novembre 2021, mettre en place son plan le plus ambitieux : le Build Back Better Act qui reprend la plupart des mesures sociales et fiscales de son programme présidentiel. Ce plan prévoit 2 200 milliards $ de dépenses répartis ainsi :

  • 495 milliards $ d’incitations fiscales auprès des entreprises pour contrôler la pollution (Accord de Paris)
  • 273 milliards $ en allocations familiales pour aider les familles avec des enfants en bas âge (0 à 5 ans)
  • 224 milliards $ pour élargir l’accès aux soins de santé dans le cadre de Medicare
  • 205 milliards $ pour mettre en place un congé parental de 4 semaines à la naissance d’un enfant
  • 185 milliards $ de crédit d’impôt pour les personnes ayant des enfants en bas âge
  • 166 milliards $ pour construire des logements sociaux à des prix abordables
  • 109 milliards $ pour une école accessible à tous les enfants âgés de 3 à 4 ans

Pour financer ce plan, la loi prévoit également :

  • 814 milliards $ de revenus via l’augmentation de l’impôt sur les sociétés
  • 655 milliards $ via l’augmentation de l’impôt sur le revenu sur les salaires des classes supérieures
  • 84 milliards $ via la limitation des prix sur les ordonnances prescrites
  • 76 milliards $ de réduction sur le prix des prescriptions Medicare du gouvernement

Les économistes ont estimé que ce plan allait alourdir la dette publique de 350 milliards $ et c’est pour répondre aux inquiétudes des électeurs modérés sur les augmentations d’impôt que Joe Manchin choisit de bloquer le passage de cette loi, cœur du projet électoral de Biden, depuis 1 an exactement. Malgré toutes les tentatives de Joe Biden, Manchin ne cède pas d’un pouce et si l’élection de mardi confirme la perte des 2 chambres par les démocrates, cette loi finira à la poubelle. En conséquence, bilan passable pour Joe Biden qui est parvenu à faire passer sa loi sur les infrastructures mais pas ses mesures sociales ce qui frustre tout le flan gauche de son électorat mené par Sanders et Ocasio-Cortez.

Inflation : côte d’alerte !

Du point de vue des chiffres de l’économie, le chômage revient, en mars 2022, au niveau d’avant crise au taux de 3,6%. Si la dette s’est creusée en 2021, la croissance du PIB est repartie à la hausse pour atteindre 5,9%. Toutefois, l’inflation explose et atteint 8,5%, pourcentage plus atteint depuis 1981. Les principaux facteurs de cette inflation sont la forte demande des consommateurs pour les biens renforcée par les programmes d’aide gouvernementaux mis en place par les administrations Trump et Biden pendant la pandémie. Entre 2019 et 2021, la croissance des salaires et des avantages sociaux a, effectivement, été la plus rapide de ces 20 dernières années. Par ailleurs, les plans de relance mis en œuvre durant la pandémie ont atteint des montants beaucoup plus élevés que ceux des autres pays du G20, contribuant à faire flamber l’inflation intérieure. Enfin, l’explosion des prix de l’énergie et la montée du dollar ont participé à la contagion de l’inflation à l’échelle mondiale. Pour faire face à cette inflation, Joe Biden signe un décret en mars 2022 qui préconise la préférence fédérale pour l’achat de biens fabriqués entièrement ou partiellement aux Etats-Unis. Autrement dit, il met en avant le « Buy American » comme le faisait Donald Trump avant lui.

La colère monte contre l’augmentation des prix de l’essence

Coronavirus : entre Mutations et doutes, le pays avance vers la fin de la pandémie

Evolution des indicateurs de la pandémie de Covid-19 et de la vaccination

Après un premier semestre 2021 optimiste quant à un retour rapide à une vie normale, le doute s’installe avec les mutations Delta puis Omicron du virus Covid-19. Les vaccins développés en urgence contre la maladie se révèlent moins efficaces qu’attendu contre ces variants alors qu’une part non négligeable de la population refuse toujours de se faire vacciner. Joe Biden et son gouvernement ne parviennent plus à convaincre les réfractaires des bienfaits du vaccin et la campagne de rappel vaccinal patauge. Le 9 septembre 2021, Biden fait passer un décret ordonnant à tous les chefs d’entreprise de plus de 100 employés de pousser leurs employés à se faire vacciner ou, à défaut, à se faire tester chaque semaine. Il rend également le vaccin obligatoire pour les 17 millions de personnes travaillant dans le secteur médical. Ses mesures sont mal reçues par l’opposition républicaine qui milite pour que l’Etat Fédéral n’impose pas de directives et qu’il y ait plutôt des réponses politiques au niveau des Etats. En outre, le gouvernement est critiqué pour ne pas avoir été capable de fournir en tests les américains et ce manque se révèle particulièrement problématique lorsque le variant Omicron fait exploser le nombre de cas en décembre 2021. Début 2022, le gouvernement tente de faire voter le réapprovisionnement des enseignes de santé en tests et vaccins mais les républicains refusent de creuser les déficits et font blocage au Sénat. La Cour Suprême enfonce le clou en retoquant le décret sur l’obligation vaccinale dans les entreprises de plus de 100 employés, jugeant que l’administration fédérale outrepassait son rôle dans ce cas. Concernant les chiffres de la pandémie, les cas de Covid-19 s’envolent au cours de la période et dépassent les 80 millions en mars, tandis que le nombre de morts dépasse le million début avril. Sur la mortalité, les Etats-Unis ont un taux de mortalité rapporté au nombre de cas supérieur de 63% à la mortalité moyenne dans les autres pays occidentaux. Si le taux de vaccination pas optimal, 67% de la population totale, est mis en avant pour expliquer ce différentiel, ce taux de mortalité révèle surtout les carences du système de santé américain et le fait que plusieurs millions d’américains n’ont pas accès aux soins par manque de moyens. En 2 ans, les experts estiment que l’espérance de vie a reculé de 3 ans dans le pays. Malgré ce passage difficile, l’horizon se dégage avec le variant Omicron, plus contagieux mais moins dangereux, et crée, de facto, une immunité collective qui permet d’envisager le passage à une phase endémique du Covid-19. Le 1er mars 2022, Biden annonce un retour à une vie normale pour très bientôt et peut souffler après avoir subi plusieurs déconvenues lors de cette dernière phase de la pandémie.

Biden, fiévreux avec un accès de toux, quand on lui annonce qu’il y a eu plus de morts du coronavirus en 1 an de mandature démocrate qu’en 2020 sous l’administration Trump

Cour Suprême : remplacement d’un juge démocrate à la Cour !

La Cour Suprême commence à faire parler d’elle durant cette deuxième partie de mandat Biden. Comme nous l’avions vu au cours de la campagne 2020, la Cour Suprême ou SCOTUS, sommet du pouvoir judiciaire américain, est composée de 9 membres élus à vie. Sous le mandat de Donald Trump, 3 juges de la Cour Suprême sont décédés ce qui a permis aux Républicains de prendre un avantage numérique décisif : 6 des membres sont désormais républicains et 3 sont démocrates. Comble de malchance, les membres les plus âgés sont démocrates et, par crainte de rendre l’âme sous une mandature républicaine, le juge démocrate Stephen Breyer, âgé de 84 ans, annonce le 26 janvier 2022 son intention de se retirer à la fin du mois de juin 2022, quand Biden a encore la capacité de nommer un juge à la Cour Suprême. Le lendemain Joe Biden prend acte de cette décision et annonce qu’il choisira une femme noire comme il l’avait promis au cours de la campagne. Le 25 février, il nomme le juge Ketanji Brown Jackson. Née en Floride, Jackson a commencé sa carrière judiciaire en stage à la Cour Suprême au service de son prédécesseur le juge Breyer puis a été nommée en 2012 juge fédérale à la Cour de justice du District of Columbia par le président Obama et enfin juge à la Cour d’appel fédéral par le président Biden en mars 2021. Le 7 avril 2022, le Sénat approuve ce choix par 53 voix contre 47 et la juge Jackson entre en fonction le 30 juin. Ce remplacement est un bon coup joué par les démocrates avant les MidTerms de 2022. En effet, il n’était pas certain que Biden conserve une majorité au Sénat et il aurait pu être empêché de nommer un juge plus tard dans son mandat.

Les démocrates peuvent souffler : ils ont désormais une juge démocrate d’à peine 52 ans

International : Tensions avec la Chine et Trahison contre les intérêts français, Biden se trumpise

Sur le plan international, Joe Biden poursuit sa diplomatie agressive à l’encontre de l’adversaire chinois. En octobre 2021, Biden exprime son inquiétude sur les essais de missiles nucléaires hypersoniques et demande à la Chine la transparence sur la teneur de ces essais et de considérer une discussion stratégique sur l’armement nucléaire entre les 2 superpuissances. En décembre 2021, poussé par différentes organisations non gouvernementales, il dénonce publiquement le massacre des Ouïghours perpétré par le gouvernement chinois et parle de génocide. En réponse à cela, il prend la décision de boycotter la cérémonie d’ouverture des Jeux Olympiques d’Hiver 2022.

En Afghanistan, suite au départ calamiteux des troupes américaines, Joe Biden décide de geler 9 milliards de dollars d’actifs destinés au développement de l’Afghanistan en raison de la prise de pouvoir des Talibans. En février 2022, 3,5 milliards $ sont débloqués à destination des associations humanitaires intervenant en Afghanistan.

Au Moyen-Orient, face à la flambée des prix du pétrole en Amérique, le président démocrate cherche à obtenir un accord avec l’Arabie Saoudite ou les Emirats Arabes Unis pour que ces derniers accroissent leur production de pétrole mais ils refusent, peut-être en souvenir des leçons de démocratie données par le candidat Biden à ces 2 royaumes lors de la présidentielle de 2020.

S’il échoue à obtenir un bon deal au Moyen-Orient, Joe Biden parvient à en obtenir un très bon en Océanie. Le 15 septembre 2021, les Etats-Unis, le Royaume-Uni et l’Australie signent un pacte de sécurité, l’AUKUS, pour contrebalancer l’influence Chinoise sur les Océans Indien et Pacifique. Cet accord prévoit la fourniture de sous-marins militaires à l’armée australienne. Or, la France, qui négociait depuis des années avec l’Australie pour approvisionner ces derniers en sous-marins nucléaires français, était parvenu à un accord. L’Australie décide unilatéralement de rompre cet accord en raison du pacte avec les américains. Outrée par le comportement de dédain et par la duplicité de son allié américain, la France rappelle son ambassadeur en Australie et aux Etats-Unis, une première depuis l’indépendance américaine. L’administration démocrate admet avoir planté un joli couteau dans le dos à son allié de toujours et Biden rencontre Macron un mois plus tard lors d’une mise en scène publique pathétique pour notre cher président français. Face aux caméras, le malicieux Sleepy Joe concèdera que les américains ont été maladroits et qu’ils pensaient que la France était au courant des négociations en cours entre les USA et l’Australie. Le pauvre Emmanuel n’aura droit qu’à une petite caresse sur la jambe en guise de consolation… snif snif.

Se faire niquer par un septuagénaire n’est pas pour déplaire à Macron (mais clairement là il boude)

Guerre en Ukraine : Biden lanceur d’alerte face à l’impérialisme russe

La première partie de mandat de Joe Biden avait été marquée par le conflit afghan où il avait été particulièrement mal conseillé. La deuxième partie de mandat de Joe Biden s’achève elle aussi par une crise internationale : la guerre entre la Russie et l’Ukraine déclenchée le 24 février 2022. Avant cela, Joe Biden a, cette fois-ci, été beaucoup mieux renseigné et conseillé. En effet, on peut considérer qu’il a été, avec son gouvernement, le seul à prendre au sérieux l’escalade des tensions entre les 2 pays et à annoncer ce que personne n’imaginait à savoir l’envahissement de toute l’Ukraine par la Russie. En novembre 2021, Poutine avait prévenu les Etats-Unis que tout déploiement de troupes de l’OTAN près de la frontière ukrainienne serait interprété comme le franchissement d’une ligne rouge par le Kremlin. En décembre, Poutine demande des garanties à Biden sur le fait que l’OTAN ne s’étendra jamais à l’Est. Biden refuse de donner de telles garanties au leader russe et la tension monte alors d’un cran. Dès le 10 janvier, Biden est persuadé que Poutine va envahir l’Ukraine et il essaie de prévenir la communauté internationale, ce qu’il fait solennellement lors d’un discours incisif devant les Nations Unies une semaine avant le début des hostilités. Suite au début de l’invasion militaire de l’Ukraine, Joe Biden se place en chef des armées de l’OTAN et décide, en accord avec ses alliés occidentaux, de sanctionner économiquement la Russie mais aussi les oligarques, Poutine et ses ministres. Le 28 février, l’administration Biden signe un décret qui sanctionne la banque centrale de Russie en gelant les actifs de la banque et en interdisant tout américain de commercer avec celle-ci. Biden bannit également les importations de gaz et de pétrole russe. Parallèlement à ces sanctions, les Etats-Unis apportent un soutien humanitaire mais aussi militaire via l’OTAN à l’Ukraine. Biden sort plutôt renforcé de cette séquence sur le plan international. Les premières difficultés militaires et économiques se font sentir en Russie et l’Ukraine parvient à résister. De plus, les Etats-Unis ont retrouvé leur place de défenseur du monde occidental face à l’impérialisme renaissant russe, rôle le plus maîtrisé par l’empire américain depuis 1945.

Biden, premier soutien du président ukrainien Zelenski

Image du Président et bilan : Joe Biden continue de creuser

La popularité de Joe Biden continue à s’éroder avec aucun effet drapeau notable suite au déclenchement de la guerre en Ukraine

En conclusion, on peut dire que cette deuxième partie du mandat Biden est bien plus difficile pour le président démocrate. L’opinion publique ne lui fait plus confiance pour juguler l’inflation et sa côte de popularité s’en ressent : il n’a plus que 41% d’opinions favorables contre 53% d’opinions défavorables sur son action. Les tensions à l’international et la fin de la pandémie ne créent pas d’élan positif. A fin mars 2022, Joe Biden est dans une position délicate et se doit d’apporter des solutions aux inquiétudes sociales s’il veut espérer que la troisième partie de son mandat ne se termine pas par une déroute électorale aux MidTerms.

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