C’est le jour J pour le lancement des primaires républicaines (et démocrates). Si la majorité des électeurs américains a exprimé, sondage après sondage en 2023, son souhait d’éviter un remake de 2020 entre Biden et Trump, tout laisse à penser que ce duel aura pourtant bel et bien lieu. Seulement 7 candidats tenteront de contrecarrer ce scénario écrit d’avance lors de ces primaires : 2 chez les démocrates et 5 chez les républicains. Parviendront-ils à faire mentir tous les sondages ? Il faudra plutôt se tourner du côté de la justice américaine pour Donald Trump ou lire les bulletins de santé de Joe Biden pour espérer voir une surprise au milieu de cet hiver glacial. Alors, Trump va-t-il refroidir tous ses adversaires dès les caucus de l’Iowa ce soir ? Joe Biden sera-t-il envoyé en EHPAD avant la convention démocrate d’août prochain ? Quelques éléments de réponse dans cet article.

Pas de suspense chez les démocrates…

C’est un rituel depuis le début des années 1970, les primaires débutent toujours par les caucus de l’Iowa et cette élection, parce que c’est la première du calendrier, a pu enclencher des dynamiques ou stopper net les ambitions de candidats célèbres dans l’histoire des élections américaines. Toutefois, les démocrates ont décidé de mettre fin à cette tradition car la population de cet état du Midwest est jugée trop blanche et pas assez représentative de la diversité de l’Amérique. C’est donc la Caroline du Sud, état avec une forte minorité noire, qui ouvrira formellement le bal des votes le 3 février prochain.

Mais, en vérité, tout a été mis en place au sein du parti démocrate pour assurer une nomination sans contestation de Joe Biden. Il n’aura que deux adversaires mineurs face à lui Marianne Williamson, mesurée à 7% dans les sondages, et Dean Phillips qui dépasse à peine 3% des intentions de vote. Pas de quoi effrayer le président sortant qui sera le candidat démocrate en 2024. Le rebondissement pourrait intervenir après les votes au cours de l’été. En effet, de nombreuses rumeurs circulent sur l’état de santé réel de Joe Biden et certains l’imaginent retirer sa candidature en juin/juillet prochain pour laisser sa place à Kamala Harris. Rumeurs identiques à celles entendues en 2020 mais cette fois-ci, en provenance de sources démocrates. A suivre donc même si je n’y crois pas.

… Et si peu chez les républicains

Du côté des républicains, les traditions seront bien respectées et les primaires démarreront en Iowa. Six candidats s’affronteront dans les urnes cette nuit : Ryan Binkley, Asa Hutchinson, Vivek Ramaswamy, Ron DeSantis, Nikki Haley et un dernier que vous connaissez bien, Donald Trump. Comme en 2016, les conservateurs traditionnels se sont démenés pour trouver une alternative crédible à l’ancien président républicain. L’élection en Iowa aurait pu servir de tremplin à une campagne victorieuse contre le milliardaire. Celle-ci devrait ressembler à une déroute voire un massacre pour tous les candidats qui ont osé se mettre en travers de la route de Trump. Toutes les stratégies ont échoué : ni l’imitation prônée par Ramaswamy ou DeSantis, ni la confrontation dure proposée par Hutchinson et des anciens candidats plus célèbres comme Pence et Christie, ni la voie centrale tentant de réunir pro et anti-Trump comme le fait Nikki Haley. Rien ni personne n’est parvenu à détourner l’électorat républicain de Trump.

A la décharge de ces pauvres candidats, l’année 2024 n’est pas une année électorale comme les autres. L’ancien président Donald Trump fait face à la justice américaine dans pas moins de 5 affaires qui pourraient lui coûter sa fortune, sa liberté et son éligibilité. Habilement, le milliardaire est parvenu à passer pour la victime expiatoire du pouvoir démocrate. « S’ils s’en prennent à moi, c’est parce qu’ils veulent s’en prendre à vous ! » Cette campagne autocentrée sur sa personne a étouffé les autres candidats mais elle n’est pas la seule raison du maintien de la popularité de Trump dans le parti. Trump est aussi celui qui parle le mieux des thématiques qui intéressent l’électeur républicain moyen : lutte contre l’immigration illégale, lutte contre l’inflation, désindustrialisation et fin de l’interventionnisme à l’étranger.

2024 devait être le retour à la normale, il marque en fait l’achèvement de la mutation du parti républicain en parti trumpiste. Avec un électorat toujours plus motivé que jamais, Trump n’aura donc aucun mal à se débarrasser de ses adversaires lors de ces primaires. Il y aura peut-être une élection plus serrée dans un état ou deux mais rien ne peut arrêter ce rouleau compresseur populaire qui représente peu ou prou la moitié de la population américaine. Ce rouleau compresseur finira tôt ou tard par percuter l’autre Amérique, celle qui vote démocrate, et le choc risque d’être rude pour les fondements de la démocratie américaine. Nous aurons l’occasion d’y revenir dans l’année qui vient.

Que peut-on espérer ce soir du caucus de l’Iowa ?

Une fois ce tableau dressé, reste-t-il un peu de suspense pour ce soir ? Le facteur X de la soirée sera certainement la météo. En effet, un blizzard balaye actuellement le petit état américain et pourrait jouer des tours aux candidats dont les électeurs sont les moins motivés. Dans le cadre des caucus, l’élection commence à partir de 19h (2h du matin en France) et les électeurs républicains auront pour challenge supplémentaire d’oser sortir de nuit sous -26°C. A ce petit jeu là, il est fort probable que les éléments favorisent encore Donald Trump, qui pourra compter sur une base électorale fanatisée prête à tout pour braver le froid polaire.

Les sondages donnent, de toute manière, une avance insurmontable de 35 points à Trump dans ce caucus : il remportera l’Iowa ce soir. L’écart avec le deuxième sera scruté de près par les experts qui chercheront une éventuelle vulnérabilité dans la base électorale du milliardaire. Le seul suspense réside dans la suite du classement : qui finira à la seconde place ? Cela devrait se jouer entre Nikki Haley, en progrès constant dans les sondages depuis 5 mois, et Ron DeSantis, en baisse constante depuis 1 an, qui a misé toute sa campagne sur le seul Iowa.

Si DeSantis finit 3ème, sa campagne pourrait se terminer immédiatement, le candidat étant exsangue financièrement et largué dans les intentions de vote des prochaines primaires à venir. Triste fin pour l’espoir numéro 1 des républicains en début d’année dernière. Parti trop tard dans la course, constamment à côté de la plaque pendant la campagne, Ron était presque en larmes lors de son dernier meeting hier soir, conscient peut-être qu’il aurait mieux fait d’attendre son tour en 2028.

Les résultats du caucus de l’Iowa devraient tomber à partir de 5h demain matin. Je débrieferai les résultats sur X.

Mon pronostic : Trump largement vainqueur