Cette nuit, on vote dans le New Hampshire, second rendez-vous des primaires. Historiquement, faire un bon résultat dans cet état est une assurance vie pour tenir la distance dans ces primaires. Or, 8 jours seulement après le caucus de l’Iowa remporté triomphalement par Donald Trump, c’est l’hécatombe chez les républicains : Hutchinson, Ramaswamy et surtout Ron DeSantis ont déjà jeté l’éponge. Seule Nikki Haley résiste encore à l’ancien président. Si l’ancienne ambassadrice des Nations Unies est financièrement parée pour emmener Trump jusqu’au Super Tuesday (le 5 mars prochain), elle ne pourra pas se contenter d’une seconde place ce soir. En effet, Donald Trump accumule les ralliements et le New Hampshire est, du fait de son mode de scrutin, l’état le moins favorable à l’ancien président. Une victoire de ce dernier signerait donc la fin de tout suspense dans ces primaires. Haley a-t-elle la moindre chance ou vais-je pouvoir me reposer après seulement 1 semaine de couverture des élections ? Analysons ensemble la situation.

L’iowa, tombeau de Ron DeSantis

Il espérait revenir de nulle part et surprendre Donald Trump en Iowa. Ron DeSantis, égérie de la droite conservatrice américaine gonflée artificiellement par les donateurs pendant toute l’année 2023, a surtout confirmé qu’il n’avait sa place nulle part dans cette élection présidentielle. Ron a eu tout faux du début à la fin. Incapable de gérer son Momentum, sa réélection triomphale au poste de gouverneur lors des MidTerms en 2022, DeSantis a cru bon de laisser Trump occuper le terrain pendant tout le premier semestre 2023. Tandis que Trump parlait de crise migratoire et d’inflation, Ron DeSantis s’est cru malin en attaquant l’ancien président par sa droite sur des thèmes casse gueule ou secondaires : avortement, covid et wokisme. Le parfait mélange pour embrasser le surnom que lui avait affublé Trump pendant la campagne : Ron DeSanctimonius (Ron le moralisateur). Devenir ringard et has been à seulement 45 ans est à peu près le seul challenge que DeSantis est parvenu à relever avec succès cette année. Une fois candidat, les affaires judiciaires de Trump étaient passées par là et toutes les thématiques que tentait de mettre sur la table le pauvre DeSantis, peu aidé par son manque de charisme, n’accrochaient pas dans l’opinion. Avec seulement 21% des voix en Iowa, Ron DeSantis a malgré tout sauvé l’honneur en terminant deuxième devant Nikki Haley. Exsangue financièrement, DeSantis ne pouvait pas aller plus loin dans cette campagne sous peine de subir humiliation sur humiliation. Il y a peut-être encore un espoir pour lui en 2028 et baiser la main de Donald Trump était la moins mauvaise solution pour la suite de sa carrière politique. Fin de l’aparté sur l’examen post mortem de la campagne de DeSantis.

Donald Trump est donc sorti comme le vainqueur incontestable de ce premier rendez-vous électoral. Avec près de 30 points d’avance sur ces 2 principaux adversaires, Trump a assommé d’entrée la coalition anti-trumpiste qui tentait de s’organiser contre lui. Contrairement à ce que beaucoup croyaient, le courant trumpiste ne représente pas le tiers mais au moins la moitié voire les deux tiers de l’électorat républicain. Dans un discours très solennel, Trump a appelé ses adversaires à mettre fin à leur campagne et à le rejoindre pour l’aider à vaincre Joe Biden en novembre. Ramaswamy s’est exécuté le soir même en apportant son soutien plein et entier à l’ancien président.

Dans le détail, Trump a pu s’appuyer sur sa base électorale populaire habituelle pour l’emporter dans 98 des 99 comtés de l’état : les populations rurales, les conservateurs religieux et les électeurs non diplômés dont les sujets de préoccupation principaux sont l’immigration et l’économie. A contrario, Nikki Haley et Ron DeSantis sont parvenus à faire jeu égal avec Trump chez les électeurs diplômés : un tiers des voix chacun. Haley doit également son score à l’électorat républicain modéré qui ne se qualifie pas comme trumpiste (33% des voix contre 46% pour Trump).

Si beaucoup d’élus républicains avaient parié sur une fatigue de l’électorat envers le personnage Trump, ce premier scrutin a enterré leurs dernières illusions. Trump avait, en outre, minutieusement préparé ces élections et bien analysé les raisons de ses échecs passés. Mieux organisé, plus modéré sur les sujets qui fâchent comme l’avortement ou le covid et moins impulsif dans sa communication, le Trump 2024 est peut-être plus fort que les versions 2016 et 2020 réunies et c’est ce qui est terrible pour sa dernière adversaire en lice.

Nikki Haley, dernier espoir des républicains anti-trumpistes dans le New Hampshire

Nikki Haley, parlons-en ! Si Trump a pris pour habitude de la surnommer « Birdbrain » (cervelle d’oiseau), Haley a pourtant su mener sa barque intelligemment pour gagner le titre de dernier challenger de l’ex président américain de ces primaires. Haley a été la première à lancer sa campagne en février 2023 après Trump. Discrète dans les médias, plutôt bienveillante avec l’ancien président dans un premier temps, Haley a mené une campagne de terrain efficace dans deux états qui lui étaient favorables naturellement : le New Hampshire, état à l’électorat modéré et la Caroline du Sud, état où elle a mené toute sa carrière politique et 4ème rendez-vous du calendrier électoral. C’est grâce à de bons sondages dans ces deux états et à des prestations de bonne facture lors des débats que Haley a progressivement percé dans les intentions de vote nationales pour s’installer solidement en troisième position. Les donateurs républicains old school de l’époque Bush, qui détestent Trump, ont vu en elle une candidate bien plus proche de leur idéologie que DeSantis et ont donné un nouveau souffle financier à sa campagne. Avec un seul objectif en ligne de mire : battre Trump dans le New Hampshire et créer le doute dans l’esprit des électeurs républicains.

Pourquoi le New Hampshire est un état plus favorable que les autres pour Nikki Haley ? Par son mode de scrutin très libéral. Il s’agit d’une des rares primaires ouvertes à tous les électeurs non encartés démocrates. Comme les primaires démocrates sont sans enjeu, de nombreux électeurs indépendants voire démocrates se sont inscrits sur les listes électorales de cette primaire et peuvent massivement influencer le résultat. On estime qu’ils représenteront 40% des votants ce soir. Suffisant pour créer une surprise ?

Malheureusement pour Nikki Haley, sa troisième place dans l’Iowa a ralenti sa progression dans les sondages de cet Etat. Alors qu’elle était virtuellement revenue à environ 5 ou 6 points de Trump dans les sondages de cet état, le résultat du caucus de l’Iowa a permis à Trump de reprendre ses distances avec son ancienne ambassadrice de l’ONU. Avec 16 points d’avance désormais, les chances de Nikki Haley sont proches de zéro. Comme le suspense de ces primaires républicaines version 2024 qui sont promises à un seul homme Donald Trump. Pour vous en convaincre, je vous invite à vous rendre sur la page dédiée aux sondages de ces primaires.

C’est avec beaucoup de regret, comme vous l’imaginez, que je vous annonce ma mise en chômage technique très prochaine. En effet, si Nikki Haley veut sauver son avenir politique à moyen terme, elle devrait rapidement mettre fin à sa campagne, une fois battue dans le New Hampshire. Même si Trump était mis KO par la justice américaine d’ici juillet 2024, le parti républicain ne pourra pas choisir comme candidat de substitution un candidat non trumpiste sous peine de perdre à plate couture en novembre prochain contre les démocrates. Elle n’a donc aucun intérêt à persévérer, son tour viendra peut-être en 2028.

Je débrieferai les résultats du New Hampshire dès demain matin sur mon compte X.

Mon pronostic : Trump largement vainqueur avec fin de campagne pour Nikki Haley