Bilan de la présidentielle : Les résultats, la défaite de Trump et des… démocrates

Aucune description disponible.

Bonjour Mesdames et Messieurs. 3 mois après mon article live de la soirée/semaine d’élection, me revoilà sur le Believe me Blog pour mettre un point final à cette élection présidentielle américaine 2020. Ma pause (flemme ?) bien méritée m’a permis de me remettre les idées en place et de prendre un peu de recul. Je vais profiter de l’anniversaire du blog (1 an la semaine dernière!) pour faire le bilan de ces 4 années Trump et donner un peu de perspectives sur la suite des événements en une mini-série de 4 articles. Celui-ci va s’attacher à analyser en détail les raisons du succès de Joe Biden en 2020 : où l’élection s’est-elle gagnée, comment les différentes catégories de population ont voté et plus important, est-ce que votre humble serviteur s’est lamentablement planté dans ses prédictions ? Je reviendrai par la suite sur la période mouvementée de la passation qui a été le théâtre de 2 coups d’états : l’un populiste (manqué) et l’autre médiatique/ »GAFAique » (réussi). Enfin, j’essaierai de dresser le bilan du mandat de Trump et de dessiner ce à quoi pourrait ressembler le mandat de Joe Biden. Je ne vous fais plus attendre, lançons nous dans les chiffres !

résultats : Une élection aussi serrée qu’en 2016

Si vous aviez bien suivi le blog en 2020, j’avais écrit un article pronostic qui clôturait 10 mois de suivi des principaux instituts de sondages américains à l’échelon National ainsi que dans les 18 Etats que j’avais jugés comme clés pour l’élection, ceux qu’on appelle les « Swing States ». Vous pouvez retrouver toute l’analyse dans le lien ci-dessous pour fact checker ce que je vais vous dire dans la suite de mon article :

https://believemeblog.com/2020/11/03/d-day-qui-sera-elu-president-des-etats-unis-en-2020/

Pendant toute la campagne, l’élection semblait jouée d’avance pour les sondeurs et les médias : Trump avait 6 à 10 points de retard sur Joe Biden et il était loin derrière dans tous les états clés. Je jugeais que les sondeurs avaient omis, sciemment ou par incompétence, des données terrain, en particulier la probable forte mobilisation de l’électorat républicain, qui annonçaient une élection très serrée. Si Biden a bien remporté le scrutin le 3 novembre, l’élection a, dans son scénario, bien plus ressemblé à ce que je vous avais annoncé. En 2016, l’élection avait penché en faveur de Trump dans 3 états pour seulement 78 000 voix. En 2020, c’est pour 123 000 voix en faveur de Biden réparties dans 4 états que l’élection s’est jouée. En raison de la forte part des votes par correspondance, que j’avais un peu sous-estimés, Trump a même été en position de réélection pendant les 24 premières heures du dépouillement avant d’observer un renversement spectaculaire dans 4 Etats clés : Michigan, Wisconsin, Pennsylvanie et Géorgie.

Quels sont les principaux chiffres à retenir de cette élection ?

Tout d’abord cette élection a été marquée par le plus fort taux de participation des citoyens américains à une présidentielle depuis… 1900 ! 66,7% des américains se sont, en effet, rendus aux urnes pour cette fournée 2020 soit une augmentation de 11% par rapport à 2016 et même 8,5% par rapport à 2008 et l’élection d’Obama. Comment expliquer un tel engouement ? L’élection présidentielle se tient toujours le premier mardi du mois de novembre et de nombreux américains ne peuvent pas se rendre aux urnes ce jour-là en raison de leur travail. Depuis quelques élections, le vote anticipé dans les bureaux de vote puis la mise en place du vote par correspondance avaient permis de ramener « aux urnes » certains électeurs. Avec l’épidémie de coronavirus, les Etats ont accéléré l’évolution des règles de vote avec la simplification des démarches de vote par correspondance et l’accroissement des dates possibles pour voter en anticipé dans les états clés. En conséquence, seulement 36% des votants ont voté le jour de l’élection contre 41% par correspondance et 23% en anticipé.

Sur le plan national, le ticket Biden/Harris l’a emporté avec 51,3% des voix (81 millions d’électeurs) contre 46,9% (74 millions d’électeurs) pour le ticket du président sortant Trump/Pence. Avec une marge d’erreur de 0,9% sur le résultat candidat démocrate et pas d’erreur du tout sur le résultat du candidat républicain, je peux, 1 an après la création de ce blog, m’attribuer le titre d’expert français de la politique américaine.

Pour rappel, mon pronostic presque parfait

Sur le plan du collège électoral par contre, je dois admettre que je me suis planté… mais de peu ! Biden l’a emporté dans 25 états, le District of Columbia et le 2nd district du Nebraska tandis que Trump a conservé 25 états et le 2nd district du Maine. Avec 306 Grands Electeurs pour Biden contre 232 pour Trump, le résultat de 2020 est l’exact inverse de celui de 2016. 5 Etats et 1 district ont « swingué » par rapport à la dernière élection : l’Arizona, la Géorgie le Michigan, la Pennsylvanie, le Wisconsin et le 2nd district du Nebraska. Trump est le 11ème Président sortant de l’histoire à ne pas parvenir à se faire réélire mais le seul en ayant malgré tout progressé en pourcentage de voix par rapport à sa première tentative (46,9% contre 46,1% en 2016).

Le résultat final de l’élection

Pour ma part, j’y reviendrai un peu plus loin dans l’article, je me suis trompé sur le vainqueur dans 3 Etats et 1 district : la Pennsylvanie, l’Arizona, la Géorgie et le 2nd district du Nebraska que j’avais tous attribués au président sortant. Toutefois, je ne me suis totalement planté sur mon analyse dans seulement 2 états : le Minnesota que je voyais très disputé et qui a finalement été remporté par Biden assez facilement et la Géorgie que je ne voyais pas du tout basculer en 2020 dans le camp démocrate.

La carte de mes rêves évanouis…

Législatives : Avertissement pour les démocrates

Sur le plan législatif, la victoire étriquée démocrate se ressent d’autant plus. La chambre des représentants reste à majorité démocrate mais de justesse puisque le parti de l’âne perd 16 sièges par rapport à 2018. Il a même manqué seulement 30 000 voix aux républicains pour faire basculer le parlement. Il est à noter d’ailleurs que c’est bien l’envie de faire barrage à Donald Trump à l’élection présidentielle qui a motivé de nouveaux électeurs à voter démocrate. 77 millions d’électeurs ont voté pour un représentant démocrate soit un déficit de 4 millions de voix par rapport aux électeurs qui ont voté Biden. L’hémorragie est bien moins grande côté républicain : 73 millions d’électeurs ont voté pour un représentant républicain (1 million de voix en moins par rapport au score de Trump).

Quand je vois toutes ces cartes bleues et rouges je me dis que je n’aimerais pas être daltonien…

Au Sénat, les démocrates récupèrent de justesse le Sénat en gagnant 2 sièges, ceux en Géorgie gagnés début janvier. On peut raisonnablement penser que ces 2 sièges seraient restés républicain si Trump n’avait pas passé deux mois à délégitimer les résultats de l’élection présidentielle. Avec cette égalité parfaite, Kamala Harris, la Vice-Présidente, pourra participer aux votes et donner une majorité aux démocrates. C’est la bonne nouvelle de cette élection pour Joe Biden : avec un Sénat démocrate, il pourra faire appliquer son programme au cours des 2 prochaines années.

Les associations contre le daltonisme vont me tuer

D’un point de vue général, on voit donc que cette élection a été serrée et ne s’est jouée qu’à quelques milliers de voix comme en 2016 mais cette fois-ci à l’avantage des démocrates. Entrons maintenant dans le détail des sous-groupes démographiques pour en tirer quelques enseignements plus précis.

démographie électorale : QUELS types d’électeurs ont changé de camp entre 2016 et 2020 ?

Un électorat qui se droitise malgré Donald Trump

Première information qui décrédibilise tous les instituts de sondage : l’électorat s’est droitisé au cours de ces 4 ans de Trump. Alors que les sondeurs envisageaient une élection avec moins de 30% de républicains dans le corps électoral, les conservateurs ont battu des records de mobilisation, plus vus depuis la réélection de Bush en 2004. Représentant 36% (+ 3% vs 2016) du corps électoral, les républicains ont fait jeu égal avec le camp démocrate (37%, =). Les 2 candidats ont, par ailleurs, fait le plein dans leur camp respectif. Les électeurs modérés ont, comme souvent dans une élection américaine, fait la décision et c’est au sein de cet électorat que la bascule est la plus spectaculaire. Trump est passé de 47% à 41% tandis que Biden a gagné 13 points pour atteindre 54% des voix parmi les indépendants. On peut expliquer ce basculement par 2 facteurs : les modérés ont sévèrement jugé la gestion de la pandémie du Président et, plus globalement, ont fini par se lasser du personnage Trump, jugé indigne de la fonction de Président et de la confiance des électeurs du fait de ses revirements permanents tant diplomatiques que politiques sur Twitter.

Sur le plan géographique, des tendances se sont confirmées par rapport à 2016. Les électeurs de zone urbaine sont très majoritairement progressistes et ce, en dépit des violentes manifestations raciales du printemps et de l’été, Biden réunissant 60% (+1%) des voix contre 38% (+3%) pour le président sortant. En zone rurale, les électeurs se sont majoritairement reportés sur Donald Trump malgré un effritement assez important (57%, -5%). Biden a certainement profité des conséquences de la politique commerciale agressive du président face aux produits chinois qui a provoqué la faillite de nombreuses petites fermes agricoles pour améliorer sensiblement son score dans cette catégorie (42%, +8%). Ce sont malgré tout les habitants de zone périurbaine qui ont fait la décision, comme annoncé un peu partout sur ce blog, basculant en faveur du candidat démocrate (50%, +5%) même si Trump a très bien résisté dans cet électorat (48%, -2%). Cette bascule s’explique par la gestion du Coronavirus mais surtout par les promesses oubliées de 2016 de Trump sur la mise en place d’un nouveau système de santé particulièrement important pour la classe moyenne, en majorité installée dans cette zone.

Biden peut dire merci aux mâles blancs de plus de 50 ans, Trump a trouvé son eldorado chez les latinos

En ce qui concerne les statistiques ethniques et de genres, l’élection 2020 pourrait bien avoir mis à mal le cliché « tous les blancs votent républicains, toutes les minorités votent démocrates ». Au rayon des clichés qui perdurent, le rapport de force Homme/Femme n’a pas vraiment évolué par rapport à 2016 : les hommes ont voté majoritairement pour Donald Trump quand les femmes se sont reportées encore plus nettement sur le candidat démocrate. Quand on rentre dans le détail par sexe et catégorie ethnique, les mouvements sont plus nets. Si Trump a perdu l’élection cette année, c’est en raison de l’érosion de son score au sein des hommes blancs. Même s’il y obtient 61% (-2%) des voix, Biden réalise une percée historique, pas observée depuis les années 1960 pour les démocrates (38%, +7%). A contrario, Donald Trump réalise des scores exceptionnels pour un républicain au sein des électorats issus des minorités. Le milliardaire progresse de 4% chez les hispaniques (hommes et femmes), de 5% chez les femmes afro-américaines et de 6% chez les hommes afro-américains. Au sein de la communauté asiatique, il progresse de 5%. Sleepy Joe perd quant à lui 3 points chez les hommes hispaniques et 4% chez les femmes afro-américaines. Il stagne dans les autres catégories. Dernière progression étonnante, Trump perce au sein de la communauté LGBT malgré la virulence des associations à son encontre (+13% !) quand Biden s’écroule de 14 points.

Comment expliquer ces évolutions ? Il faut regarder par catégorie d’âge pour comprendre ces mouvements. Trump paye la politique désastreuse de son mandat sur le volet de la protection sociale (santé, éducation), politique qui s’est révélée défaillante avec la crise du Covid. Il a donc été abandonné en partie par ces électeurs actifs blancs de plus de 45 ans : Trump perd 1% quand Biden y progresse de 4%. Chez les démocrates, la campagne pro-minorités à outrance leur aura presque coûté l’élection. Biden perd 11% chez les 30/44 ans afro-américains, tranche de la population qui aura le plus profité des baisses de chômage pendant le mandat Trump. L’autre basculement spectaculaire est observé au sein de l’électorat latino de + de 60 ans. Trump y fait un gain de 15%, soit 40% des voix, quand Biden en perd autant (58%, -15%). Cette hémorragie s’explique par la gauchisation des luttes démocrates (Black Lives Matter, féminisme, lutte pour les droits LGBT…) qui ont agacé cette frange conservatrice de l’électorat latino en provenance de Cuba et du Mexique principalement.

Is it still the economy, stupid ?

Le dernier volet de l’analyse démographique, et non des moindres, est celui de la répartition des votes en fonction de la situation économique. Là encore quelques évolutions sont à noter par rapport à 2016. En effet, si les revenus les plus modestes se sont reportés en majorité sur les démocrates, l’écart s’est réduit à 8% contre 12% en 2016. A contrario, Donald Trump s’écroule dans la tranche de la classe moyenne qui gagne entre 50 000 et 100 000 $ par an. Il réalise 42% (-8%) tandis que Biden prend 11% en comparaison avec 2016. Cet écart s’explique là encore par le manque de réalisations sociales du gouvernement Trump sur le plan de la santé. Les résultats économiques n’auront pas suffi dans cette partie de la société alors qu’il gagne 10% (58%) dans la tranche supérieure, celle des personnes gagnant entre 100 000 et 200 000 $ par an. Il s’agit de la partie de la population qui a le plus profité des augmentations de salaire et des baisses d’impôts durant son mandat.

En conséquence, l’économie n’aura pas permis à Trump de s’en sortir malgré les résultats corrects obtenus par son gouvernement jusqu’en mars 2020. En effet, pour ne pas perdre le soutien de ses élus républicains, Trump a opté pendant 4 ans pour une politique intérieure ultra-libérale de dérégulation à la fois bancaire, énergétique et écologique mais aussi sociale et en particulier sanitaire. Si l’économie était bien le premier thème cité par les électeurs de cette élection, il l’était surtout aux yeux de l’électorat républicain déjà acquis à sa cause (35%) quand l’électorat démocrate s’inquiétait plutôt pour les inégalités raciales (20%) ou l’épidémie de coronavirus (17%). Il a d’ailleurs largement emporté les suffrages de ceux qui considéraient que leur situation économique s’était améliorée en 4 ans (41% des électeurs) mais il a perdu largement auprès de ceux qui n’ont pas vu de différence flagrante par rapport à 2016 (39% des électeurs). Son manque d’empathie pendant la crise du coronavirus à l’égard des nombreuses victimes et son ego surdimensionné, qui lui ont fait dire plusieurs fois qu’il avait mis fin à la pandémie comme par magie, lui ont finalement coûté une élection qu’un président sortant normal aurait certainement emporté.

les 15 swing states de 2020 où s’est jouée l’élection

13 ans après mon bac d’histoire-géo, observez mes progrès pour dessiner une carte

Hep hep hep ! Je n’en ai pas encore fini avec vous. Avant de vous laisser vaquer à d’autres occupations, permettez moi d’analyser géographiquement ces résultats. Administrativement, les Etats-Unis sont divisés en 4 régions géographiques : le Nord-Est urbain tourné vers le tertiaire et économiquement prospère; le Midwest industriel, composé de larges zones périurbaines et en déclin économique (Rustbelt), le Sud, souvent surnommé la Sunbelt, en plein essor économique et en transformation démographique et enfin l’Ouest qui comprend les grandes zones agricoles et arides mais aussi toute la côte ouest urbaine et dynamique. Parmi ces 4 régions, les deux prétendants ont bataillé dans 14 états clés et 2 districts. Je vous les avais heureusement tous présentés au cours de l’année 2020 et dans mon article final. Quels sont les changements principaux par rapport à l’élection de 2016 ?

A l’Ouest, rien de nouveau ou presque

L’élection 2020 n’a pas créé de grands bouleversements à l’Ouest par rapport à 2016 à un détail près : le basculement de l’Arizona. En effet, les Etats ruraux du Nord ont, comme prévu, largement soutenu Donald Trump tandis que les Etats de la côte Ouest, urbains et progressistes ont voté pour Joe Biden. Le Colorado et le Nouveau-Mexique se sont ajoutés à la liste des Etats désormais imprenables pour les républicains en raison de l’évolution démographique de ces Etats, désormais très jeunes, latinos et progressistes. Seuls le Nevada et l’Arizona ont été disputés dans cette région. Perdu pour 33 000 voix, le Nevada était aussi serré qu’en 2016 et aurait certainement pu être encore plus disputé si la crise du coronavirus n’avait pas eu lieu. En effet, Trump a perdu quelques milliers de voix au sein de la communauté blanche de la classe moyenne vivant dans les zones périurbaines et travaillant habituellement dans le tourisme. Sans eux, les progrès réalisés au sein de la communauté latino n’ont pas permis au président de faire basculer cet Etat. Dans l’Arizona voisin, l’élection s’est jouée à 10 000 voix près. L’arrivée massive de retraités californiens blancs plutôt progressistes explique, en partie, cette bascule qui paraissait tôt ou tard inévitable. Toutefois, l’échec de l’administration Trump dans la gestion de la crise du covid, combiné à son image détestable auprès des modérés républicains (anciens soutiens de John McCain) ont été les véritables causes de cette défaite puisque Trump a perdu beaucoup de voix de la classe moyenne blanche. Son score excellent auprès des latinos (40%) reste un motif d’espoir pour les républicains à l’avenir. Si les hispaniques basculent côté républicain au cours de la décennie 2020 alors l’Etat pourrait revenir dans le giron conservateur.

Résultat de recherche d'images pour "arizona latinos trump"

Le Nord-Est, l’échec personnel de Donald Trump

Lorsque Donald Trump avait lancé sa campagne de réélection mi-2019, celui-ci était persuadé de conserver largement la Pennsylvanie et prévoyait de mener une campagne agressive dans le Maine et le New Hampshire, deux Etats historiquement progressistes mais également ruraux. 1 an et demi plus tard, Trump n’a remporté que le 2nd district du Maine. Pourquoi un tel échec ? Peut-être parce que les 2 petits Etats du Nord-Est, socialement plus progressistes, ont été insultés par le Président de « tanières infestées de drogués » suite à la légalisation de la marijuana dans ces Etats. Par ailleurs, le sujet de la couverture santé est un thème majeur dans ces 2 Etats très influencés par les pratiques européennes. En ne remplaçant pas l’Obamacare comme il l’avait promis en 2016 et avec la cerise coronavirus, la victoire de Trump dans ces 2 Etats est devenue mission impossible. Il a, en conséquence, perdu le New Hampshire et le Maine 2 Etats par 7% et 9% contre 0,5% et 3% en 2016. En ce qui concerne la Pennsylvanie, la crise économique provoquée par le covid n’a certainement pas arrangé les affaires de Trump. Comme je vous l’avais annoncé, l’élection s’est jouée à peu de choses : 81 000 voix exactement. De nombreux bulletins sont arrivés par courrier 3 jours après l’élection. On peut juger cela anti-démocratique mais les démocrates avaient juridiquement bien ficelé leur opération en amont. Ce vote par correspondance a permis à des gens des grandes villes de voter pour la première fois et ils ont voté démocrate. Il fallait parvenir à mobiliser cet électorat et les équipes démocrates y sont arrivées parfaitement. Le message anti-Trump a fonctionné à la marge et cela a été suffisant. Trump, persuadé que la crise du covid serait terminée à l’été, n’a pas vu d’opportunités de débusquer de nouveaux électeurs par le vote par correspondance et n’a rien pu faire à part dénoncer une fraude qui n’a jamais été prouvée. A l’avenir, toutefois, cet Etat pourrait de nouveau basculer voire devenir finalement un bastion républicain : les électeurs de zones périurbaines n’ont pas lâché les républicains en 2020.

Résultat de recherche d'images pour "pennsylvania mail in ballot"

Le Sud, zone de résistance Trumpiste malgré la Géorgie

Si le Nord-Est est un échec personnel pour Trump, la région Sud est, avec la région Midwest, celle de l’échec des analystes politiques. Complètement aveuglés par des sondages biaisés beaucoup trop favorables aux démocrates, les médias ont pris peur lors de l’annonce des résultats de la SunBelt : progression exceptionnelle du score de Trump chez les latinos et dans les zones urbaines au Texas et en Floride et mobilisation sans précédent des républicains, le début de la soirée électorale a failli tourner au cauchemar comme en 2016. Comment expliquer cette droitisation dans ces 2 Etats ? Premièrement, les règles du vote par correspondance étaient les mêmes qu’il y a 4 ans et Trump a encouragé ce mode de vote dans ces Etats : moralité les républicains ont plus voté aussi grâce au vote par correspondance qu’ailleurs. Deuxièmement, ces 2 Etats ont été beaucoup moins touchés par la crise du coronavirus, les électeurs ont donc plutôt voté en fonction du bilan économique de Trump qu’ils ont jugé bon. Enfin, cette campagne a marqué l’échec total de la racialisation du discours démocrate : les discours extrêmement libéraux pro-Black Lives Matter et pro-lgbt ont repoussé une frange importante des hispaniques beaucoup plus conservateurs qu’ailleurs. En Caroline du Nord et surtout en Géorgie, la donne a été bien différente pour le président sortant. En effet, le coronavirus a frappé plus durement la Caroline du Nord qui a confiné et mis en place les règles les plus laxistes pour voter : les bulletins par correspondance ont pu être comptabilisés jusqu’à 9 jours après l’élection. Cependant, Trump a parfaitement résisté et a conservé environ 1,5% d’avance grâce à la forte mobilisation des républicains le jour du vote dans les zones rurales et périurbaines. En ce qui concerne la Géorgie c’est un événement majeur de la campagne, que j’ai mal apprécié, qui a fait basculer le résultat dans le sens des démocrates : la mort de George Floyd. L’émotion ressentie par la communauté afro-américaine a été particulièrement intense dans cet Etat qui s’est mobilisée comme jamais dans les urnes (29% du total des votes). En votant à 88% pour Joe Biden, le démocrate est parvenu à renverser le rapport de force en sa faveur. C’est le seul Etat où la tactique démocrate aura donc fonctionné. Un bon contre-exemple pour ma façon de pensée un peu trop systémique.

Résultat de recherche d'images pour "georgia 2020 election"

Le Midwest, zone du combat électoral 2020

Dans le Midwest enfin, il y avait 5 Etats et 1 district à suivre : Iowa, Ohio, Michigan, Wisconsin, Minnesota et 2nd district du Nebraska. Contrairement aux sondages, Donald Trump a parfaitement résisté en Ohio et en Iowa reproduisant ces scores de 2016. La raison ? Ces deux Etats sont beaucoup plus ruraux et la politique économique protectionniste, jugée bonne par les électeurs, a prévalu sur la situation sanitaire. Autres Etats mal évalués par les analystes : le Michigan et le Wisconsin. Trump les avait gagnés d’extrême justesse en 2016… Il les a perdus de très peu cette fois-ci. Dans le Michigan, la bascule s’est faite dans la zone périurbaine où la classe moyenne blanche a puni la politique sanitaire de son président. Dans le Wisconsin, c’est une défaite pour raison économique : les agriculteurs américains, qui avaient soutenu en masse le programme protectionniste du candidat Trump qui promettait une guerre commerciale aux produits chinois mais aussi aux produits des voisins canadiens et mexicains, l’ont en partie lâché cette fois-ci. En effet, en réaction à l’augmentation des droits de douane, ces pays ont surtaxé les exportations agricoles américaines, qui ont été réduites de moitié en 4 ans. Si le ministère américain de l’agriculture a couvert les pertes à hauteur de 40%, ce sont les petits producteurs qui ont reçu le moins d’aides provoquant faillites des fermes familiales du Wisconsin. Entre 2017 et 2019, ce ne sont pas moins de 2 000 fermes familiales qui ont mis la clé sous la porte. En fin de compte, il a manqué 20 000 voix à Donald Trump pour conserver le Wisconsin… Enfin, le Minnesota et le 2nd district du Nebraska se sont plus nettement prononcés pour le candidat démocrate contrairement à ce que j’avais pensé. Dans le Minnesota, j’attribue cette erreur d’analyse aux conséquences de la mort de George Floyd, intervenue à Minneapolis. Le discours « Law&Order » de Trump n’a pas porté ses fruits ici et a même fait peur à la classe moyenne périurbaine. Enfin, au Nebraska, j’avais parié que le discours anti-Trump ne fonctionnerait pas : il a marché plus que jamais. Trump a en effet perdu ce grand électeur de 6% quand le sénateur républicain sauvait son siège de 2%.

Résultat de recherche d'images pour "wisconsin farmer trump biden"

Conclusion : les 3 leçons principales de l’élection 2020

Me voilà arrivé au terme de cet exercice laborieux d’auto-critique et d’analyse. De cette élection, j’en retire 3 grandes leçons :

1. L’ego surdimensionné de Trump lui a coûté l’élection. S’il a été un atout pour solidifier sa base électorale comme jamais de 2017 à 2019, cet ego lui a fait perdre toute lucidité pendant la crise du coronavirus où il a alterné entre déni de la pandémie et auto persuasion que tout avait été parfaitement géré. Déni qui lui a fait perdre son flair électoral sur le sujet du vote par correspondance.

Résultat de recherche d'images pour "trump ego"
Suicide, mode d’emploi

2. Le bilan économique d’un président reste une donnée de valeur pour jauger ses chances de réélection mais, comme en 2016, celui-ci a été un leurre : les électeurs dont le cœur balance entre démocrate et républicain depuis 2008 attendent également des mesures de protection sociale face à la mondialisation. En épousant la ligne ultra libérale des républicains sur le système de santé (contrairement à 2016), Trump a perdu une partie de la classe moyenne ouvrière blanche qui l’avait faite gagner.

Résultat de recherche d'images pour "trump healthcare"

3. La dérive gauchiste et pro-minorités des démocrates a montré ses limites et ne paiera pas à long terme dans une société qui se droitise. A moins de criminaliser les opinions conservatrices divergentes (mais alors pourra-t-on encore parler de démocratie ?), les démocrates devront rapidement revoir leur logiciel sous peine de perdre Sénat et Chambre des Représentants en 2022, et peut-être la prochaine élection présidentielle en 2024.

Résultat de recherche d'images pour "joe biden left extremists"
Sauve-nous Dieu de l’univers des progressistes

Laisser un commentaire